La fièvre de lait (terme mal choisi car il n’y a pas de « fièvre » à proprement parlé) ou hypocalcémie post-partum est une affection métabolique extrêmement fréquente en élevage laitier.

NB : la calcémie est la concentration en calcium dans le sang

Quels sont les symptômes de la fièvre de lait?

Les animaux les plus fréquemment touchés sont les vaches laitières hautes-productrices autour de 5 ans.

Les symptômes apparaissent dans les 48h suivant le vêlage. Dans un premier temps, la vache a une démarche hésitante voire chancelante. Puis elle se couche et peut paraître somnolente.

La paralysie est ascendante (elle débute par la file puis remonte aux membres postérieurs puis antérieurs) et aboutit souvent à une position dite «d'auto-auscultation»:

Illustration vache laitière

Les signes fréquemment constatés, en plus de cette incapacité à se relever, sont:

  • Une hypothermie  : entre 36 ° et 38 ° de température rectale;
  • Les extrémités sont froides (oreilles, queue, bouts des pattes…);
  • Un arrêt de la rumination et du transit digestif;
  • Un mufle sec  ;
  • Une respiration ample et ralentie , ce qui peut faire penser que la vache dort.

Sans traitement, la vache rentre dans le coma et la mort survient en quelques heures dans environ 50% des cas.

Quelles sont les causes de la fièvre de lait chez la vache laitière?

Chez la vache, le vêlage est toujours associé à une hypocalcémie et une hypophosphatémie .

Ces phénomènes biochimiques passent généralement inaperçus car ils n'entrainent pas de signes cliniques importants.

Cependant, chez certaines femelles, particulièrement prédisposées du fait de leur haut rendement laitier et de leur régime alimentaire déséquilibré, ces perturbations métaboliques s'accentuent très nettement et aboutissent aux troubles caractéristiques de la fièvre vitulaire.

99% du calcium de l'organisme se trouve dans les os du squelette.

Cela constitue une réserve calcique d'environ 6 kg pour une vache de 500 kg. Pour autant, sans préparation correcte au vêlage, la quantité de cette réserve mobilisable par l'organisme est extrêmement faible: de l'ordre de 15-20 g par jour.

La vache laitière a des exportations importantes en calcium en fin de gestation et lors de l'entrée en lactation:

  • Fœtus: 4-5 g / j
  • Bouses: 8 g / j
  • Lait: 1,2 g / L
  • Colostrum: 1,5 - 2,5 g / L
  • Urines: 1,3 g / L

Par exemple, un vache qui produit 15 L de colostrum par jour peut avoir une perte de 40 g de Ca par jour. 

Ce qui fait que la balance calcique est inévitablement négative chez les vaches laitières hautes-productrices (c'est-à-dire que les sorties sont supérieures aux apports).

Il est à noter que l'absorption digestive du Ca est active , d'où la présence d'une limite maximale (une fois ce seuil atteint, tout le calcium ingéré par la vache se retrouvera dans les bouses…), contrairement à celle du phosphore, qui est passif et donc pour lequel il n'existe pas de seuil (on peut augmenter fortement le taux de phosphore sanguin par apports oraux).

Comment traiter la fièvre de lait chez la vache laitière?

Le traitement du vétérinaire réside en une perfusion intraveineuse lente de calcium , souvent accompagné de magnésium et de phosphore. Il est fréquemment ajouté un complément de calcium par voie sous-cutanée afin de limiter le pourcentage de rechute grâce à cette résorption plus lente.

L'animal se relève classiquement dans l'heure qui suit la perfusion. Si ce n'est pas le cas, il faut que le vétérinaire revienne faire une perfusion de calcium 12 à 24h après, et il ne faut pas hésiter à tourner la vache de côté 3-4 fois par jour pour prévenir les escarres.

Comment prévenir la fièvre de lait chez la vache laitière?

La prévention de la fièvre de lait repose sur une des trois  stratégies suivantes, appliquées dans les 2-3 semaines avant vêlage  :

Réduire les apports calciques (et potassiques) et les augmenter juste avant le vêlage 

Cette approche traditionnelle permet de limiter l'hypocalcémie de vêlage, l'organisme de la vache ayant «pris l'habitude» de puiser du calcium dans ses réserves osseuses (par l'intermédiaire d'une horm

Illustration vache

un: la parathormone).

En pratique, il ne faut pas apporter plus de 30 à 40 g de calcium par jour durant le tarissement (au lieu d'environ 150 g durant la lactation), et distribuer du calcium buvable facilement et rapidement assimilable le jour du vêlage, et dans les jours qui suivent.

Mais cette stratégie, bien qu'efficace, reste difficilement applicable car le pâturage, le foin ou l'ensilage d'herbe contient du calcium en quantité non négligeable.

Diminuer le Bilan Alimentaire Cations- Anions (BACA) (on ne soucie pas ici de la quantité de calcium apportée) 

Le BACA d'un aliment ou d'une ration est défini par (Na + + K + ) - (Cl - + S 2 - ). Son calcul est complexe mais l'objectif est que ce BACA soit nul ou légèrement négatif (environ -50 à 0 mEq / kg de matière sèche de ration), aboutissant à une acidification de la ration, ce qui veut:

  • Une légère baisse du pH du sang et des urines ,
  • Une augmentation de l'absorption intestinale de calcium et une activation de la vitamine D 3,
  • Et finalement une élévation de la calcémie .

Le problème est qu'on a souvent une méconnaissance des teneurs en sodium, potassium, chlorures et sulfates des fourrages. En pratique, il faut éviter le chou fourrager, le colza fourrager, la luzerne et la pulpe de betterave. On peut également complémenter, dans les 2 dernières semaines de tarissement, avec du chlorure de magnésium afin de diminuer le BACA. Ces sels minéraux sont souvent peu appétants, il faut donc bien mélanger les 50 g de MgCl recommandés à la ration.   

Injecteur de la vitamine D3

Si diminuer le BACA est difficile ou impossible à mettre en place, on peut par défaut réaliser une injection unique de vitamine D 3 entre 2 et 8 jours avant vêlage.

L'absorption de Ca étant actif et sous la dépendance de cette vitamine, plus sa concentration sanguine est importante, plus la quantité de Ca absorbée sera grande. Pour avoir une bonne efficacité, cette injection s'accompagne par une complémentation en calcium buvable dans les 24h précédentes le vêlage.

La fièvre de lait est une pathologie incontournable en élevage laitier, il faut donc être très vigilant sur la préparation au vêlage en vue de prévenir cette hypocalcémie. De plus, lorsque cette dernière n'est pas clinique (c'est-à-dire signalé n'est pas suffisamment marqué pour déclencher une fièvre de lait, et donc souvent non détectée par l'éleveur), peut être aussi problématique , en concourant au déclenchement de déplacement de caillette, non délivrance ou mammite.